Lomé accueille le 1er Forum du Réseau Habitat d'Urgence Francophone

Lomé, Togo – du 1er au 3 juillet 2025. L’École Africaine des Métiers de l’Architecture et de l’Urbanisme (EAMAU) a été le théâtre du tout premier Forum du Réseau Habitat d’Urgence Francophone (RHUF), un événement inédit réunissant des acteurs humanitaires, chercheurs, praticiens, agences des Nations Unies, ONG, bailleurs de fonds, représentants étatiques et du secteur privé autour du thème central : « Repenser l’assistance en habitat d’urgence dans l’espace francophone : Unir les acteurs, Innover et Agir durablement ».

Organisé en format hybride (présentiel et virtuel), ce forum a réuni des participants de plus de 15 pays francophones, dans un contexte mondial marqué par l’intensification des crises humanitaires, les déplacements forcés et le changement climatique.

Un rendez-vous stratégique face à des défis croissants

Dans un monde où plus de 114 millions de personnes sont déplacées de force (HCR, 2024), et où les catastrophes naturelles aggravent les vulnérabilités, les modèles traditionnels d’assistance abris sont de plus en plus remis en question. Le forum a répondu à l’appel pressant de réinventer les solutions d’habitat d’urgence, à travers des approches plus durables, adaptées localement et respectueuses de l’environnement.

Le ministre togolais de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Kanka-Malik Natchaba, a salué cette initiative comme une étape essentielle pour structurer un réseau solide d’expertise francophone capable de proposer des solutions innovantes, contextualisées et pérennes.

Des thématiques clés au cœur du forum

Adaptation des solutions d’habitat d’urgence au changement climatique

Face à l’augmentation des événements extrêmes (inondations, sécheresses, cyclones), les intervenants ont souligné l’urgence d’intégrer des matériaux biosourcés, des techniques de construction locales et des approches bas-carbone dans la réponse abri. Des exemples de constructions résilientes au Sahel ou de prototypes semi-durables en Haïti ont été présentés comme modèles à étudier.

Assistance par transfert monétaire pour l’habitat d’urgence

Le cash transfert apparaît comme une alternative souple et centrée sur le choix du bénéficiaire. Les débats ont porté sur les conditions de faisabilité (marchés, inflation, sécurité), les stratégies de ciblage, et l’équilibre entre autonomie des ménages et impératifs techniques. Des retours d’expérience du Burkina Faso, du Cameroun et du Liban ont illustré les bénéfices mais aussi les limites de ce mode d’assistance.

Renforcer les liens entre les acteurs de l’habitat d’urgence et le milieu académique

L’une des ambitions phares du forum a été de briser les silos entre praticiens humanitaires et chercheurs. L’EAMAU, en tant qu’institution hôte, a plaidé pour l’intégration des problématiques d’habitat humanitaire dans les cursus académiques d’architecture et d’urbanisme, tout en favorisant la recherche-action et les stages en contexte de crise. Un protocole d’intention a même été évoqué pour créer un réseau académique francophone.

Financement de l’habitat humanitaire dans un contexte budgétaire contraint

Alors que les budgets humanitaires sont en stagnation voire en recul, les discussions ont pointé l’importance d’une priorisation stratégique, du plaidoyer auprès des bailleurs, et de l’intégration de l’habitat dans des programmes multisectoriels (santé, protection, relèvement).

Localisation du financement : contraintes, leviers et perspectives

Sous l’angle du Grand Bargain, plusieurs sessions ont mis en évidence les défis liés à la canalisation directe de fonds vers les ONG locales, souvent exclues des mécanismes de financement traditionnels. Des solutions innovantes telles que les fonds de consortium nationaux, les dispositifs de garantie ou les guichets spécifiques aux ONG du Sud ont été discutées.

Adaptation stratégique de la coordination des clusters Abris

Avec des contextes de plus en plus complexes (zones d’accès limité, crises prolongées), la coordination des clusters doit évoluer. Des recommandations ont été formulées pour une coordination plus inclusive, intégrant les autorités locales, les ONG nationales et les bénéficiaires eux-mêmes.

Études de cas : pratiques prometteuses et défis opérationnels

Plusieurs études de cas ont été présentées, illustrant des approches innovantes : unités modulables en RDC, abris en terre compressée au Niger, utilisation de SIG pour le ciblage au Tchad, ou encore expérience participative de reconstruction au Sénégal.

Une participation active de la RDC à travers MIDEFEHOPS ASBL

Parmi les délégations africaines présentes, la République Démocratique du Congo a été représentée par Madame Anuarite Kabuo Kalunga, de l’organisation MIDEFEHOPS ASBL, active dans l’assistance en abris d’urgence dans les provinces du Nord-Kivu et Sud-Kivu. Sa participation a contribué à faire entendre la voix des terrains congolais, confrontés à des déplacements massifs dus aux conflits, et à valoriser l’expertise locale développée en contexte instable.

Vers une nouvelle dynamique francophone de l’habitat humanitaire

Au terme de ces trois journées riches en échanges, les participants se sont accordés sur la nécessité de renforcer la structuration du Réseau francophone, de promouvoir le transfert de compétences Sud-Sud, et de créer des espaces pérennes d’échange et de co-construction. Une déclaration de Lomé est en cours de rédaction pour formaliser les engagements issus du forum, avec une attention particulière portée à l’inclusion des acteurs locaux et à la transition vers des solutions durables.

Le 1er Forum du Réseau Habitat d’Urgence Francophone s’est imposé comme un jalon majeur dans la construction d’un écosystème solidaire, innovant et opérationnel autour des enjeux d’abris et d’habitat humanitaire.